La poussière du temps tombe sur toutes choses, grandes et petites,
Comme la neige tombe sur Berlin,
Berlin ville des anges qui chutent dans le temps
Depuis « Das Himmel uber Berlin », ou depuis la destruction ?
Éparpillement, émiettement, séparation, dissémination
même lorsque le corps des amants
squelette en attente de tomber en cette poussière
poussière d’ étants
enlacé en étreinte mortelle
Se murmure des serments d’ éternité
Mais il y a de l’or dans cette poussière
L’or du Réel-Un
Là où le Temps devient Espace
Et l’espace ne se résout plus en une multiplicité pure de points : un ensemble
La poussière du temps film ultime de Theo Angelopoulos
à la fin du film Jacob Lévy (joué par Bruno Ganz) choisit le non-retour, se jeter dans le fleuve, parce qu’il croit que l’aile de l’ange, celle qui est portée par le subtil murmure du temps qui est la Création, va le porter et le conserver
Quand la troisième aile de l’ange de l’Histoire fut coupée alors « commença » la chute dans le temps.
Mais si rien ne finit, jamais, rien ne commence vraiment non plus.
La troisième aile de l’ ange, qui est l’Esprit, ne fut point coupée à un moment de l’Histoire, ni lors d’un concile, ni à l’orée de l’époque moderne.
Elle porte d’un bout à l’autre de la conque murmurante du temps, qui est l’existence internelle, la potentialité d’une sortie de l’Histoire émiettée, éparpillée, d’une décantation de l’or dans la poussière et les scories.
Lorsque la portance de l’aile est absente alors s’exerce le règne du Moi Je, de la masse anonyme du « On »
« « Moi je. Le premier venu. Chacun. Personne.
Signe : néant. A peine suis je moi.
A peine suis je. »
Mais s’il est élevé par l’aile au dessus des flots du temps émietté le Moi Je se relève en le Tu Es
« O seul Absent tu m’investis
Tu m’investis du centre en moi où je ne suis
Ton vide écarte mes murailles
Ta Nuit m’enlève ma clarté
Tel un cristal cataracté.
Oui mes ténèbres voient ! »
et voici l’ange de l’Histoire évoqué par Walter Benjamin à propos de l’Angelus Novus de Klee:
https://fr.m.wikipedia.org/wiki/Angelus_Novus_(Klee)
« cet Ange de l’Histoire dont le visage est tourné vers le passé qui ne voit qu’une catastrophe sans modulation ni trêve, amoncelant les décombres et les projetant éternellement devant ses pieds… Alors qu’il voudrait se pencher sur ce désastre, panser les blessures et ressusciter les morts, une tempête s’est levée du Paradis, et gonfle ses ailes déployées qu’il n’arrive plus à replier. Cette tempête l’emporte vers l’avenir auquel l’Ange ne cesse de tourner le dos, tandis que les décombres, en face de lui, montent au ciel. Nous donnons le nom de « Progrès » à cette tempête »